Il arrive devant moi dans la salle d'audience dédiée de l'hôpital psychiatrique de Tours, en djellaba et le visage palestinien. Il se présente: "Je suis le Christ!". Je lui réponds tout de go: "Ce n'est pas possible, je L'ai déjà rencontré!". Face à son étonnement je pars dans les explications théologiques de l'Eucharistie et de la présence du corps du Christ dans le vin et le pain de la célébration de la messe, événement que l'intéressé ne connaît pas et que je lui fais découvrir. A la fin de la démonstration, je lui dis: "Alors, vous êtes toujours le Christ?". Un long moment de silence avant: "Euh, en fait non, mais je voudrais lui ressembler." Ce à quoi je l'ai vivement encouragé.
Cette aventure particulière m'a ramené à l'époque où je présidais le Tribunal correctionnel de Bressuire; nous jugions un incendiaire estimé responsable de ses actes par le psychiatre et qui tout à coup, lors de l'interrogatoire d'identité, répliqua qu'il était Dieu. Je pris la répartie au sérieux: "Mais vous nous mettez dans l'embarras. Qui peut juger Dieu?" et j'en appelais au secours le procureur de la République: "Monsieur le procureur, qui peut juger Dieu, ce Dieu incendiaire aux prises avec les flammes de l'Enfer?!". Finalement, rendant à César ce qui était à César (le tribunal en sa collégialité), nous rendîmes Dieu à lui-même et fidèles à la tradition biblique, nous l'avons condamné et nous l'avons remis aux centurions qui l'attendaient. Quel métier!