Replongé dans l'affaire Dominici par la lecture de William Reymond dont je parlais l'autre jour et du procès Dominici dans l'édition du Monde consacrée il y a quelques années aux grands procès du siècle, je suis retourné à l'opuscule de Jean Giono, "Notes sur l'affaire Dominici" -suivi d'"Essai sur le caractère des personnages" (de cette affaire), réédité chez Folio.
Jean Giono, le local, habitant Manosque, avait eu , avec Armand Salacrou,une place de choix pour assister à Digne au procès, puisqu'il fut autorisé à être assis derrière le président, voyant ainsi directement tous les protagonistes. Giono insiste beaucoup sur le déséquilibre de compréhension entre les deux magistrats professionnels, le président et l'avocat général, qui disposaient de plusieurs milliers de mots, et l'accusé, qui n'en utilisait qu'une cinquantaine, au maximum. Malgré tout cet écart, et cette incompréhension, en dépit d'un dossier bâclé sinon truqué, Gaston Dominici fut condamné à mort. Giono avait arrêté sa prise de notes et disparut avant l'intervention de l'avocat général, qu'il ne voulait pas entendre, et avant les plaidoiries de la défense. C'est bien dommage. Je crois qu'il savait comment cela finirait (il l'écrit), les jurés ayant été murés dans le silence continuellement et faisant demander par l'un d'entre eux -Giono finit ainsi-: "On voudrait bien que ça se termine ce soir" (j'ai lu, ailleurs, que parmi ces jurés mal défrayés pour un si long procès, l'un attendait avec insistance une vache à vêler). A quoi tient la vie d'un homme?